Vivre dans le monde en citoyens capables

Contexte : la crise étudiante du printemps 2012 au Québec

Le présent article a été présenté comme message biblique, le 27 mai 2012, à la Communauté chrétienne des Deux-Rives, lors d’un conflit étudiant devenu crise sociale, conduisant à une polarisation des québécois – dont les membres de cette communauté de foi – et à  700 arrestations massives au Québec dans la semaine avant cette présentation.

Vivre dans le monde en citoyens capables - Ésaïe 30.15
En effet, voici ce qu’avait dit le Seigneur, l’Eternel, le Saint d’Israël :
« C’est dans le retour à moi et le repos que sera votre salut,
c’est dans le calme et la confiance que sera votre force »,
mais vous ne l’avez pas voulu ! (Ésaïe 30.15, Segond 21)

À mesure que la date de présentation s’approchait, la crise sociale allait s’accentuant et s’aggravant toujours de plus en plus. Des émissions télévisées d’analyse rapportaient une polarisation affectant tous les groupes sociaux et divisant entre eux les membres des familles. Ce que rapportaient les médias se produisait également à même la communauté de foi à laquelle je participais à cette époque. Les uns étaient de fervents supporters du mouvement étudiant. Les autres s’y opposaient avec tout autant de vigueur. L’indignation et la colère étaient présentes en sourdine dans tous les camps.

La Bible, source de savoir et de sens : Parole de Dieu et source de désir, homélie prévue et prête me parut dans ce contexte comme un cours sur le jardinage en plein tremblement de terre. Qui s’y intéresserait ? J’assumai donc le risque de préparer un nouveau message biblique au tout dernier moment. J’appliquerais à la situation en cours les conséquences de l’exposé prévu.

Il ne s’agissait donc plus de faire la démonstration de la valeur de la Bible pour nous aujourd’hui, comme dans l’exposé prévu, mais de puiser dans les Écritures les ressources que j’y voyais pour traverser une crise sociale dont l’envergure ne cessait de s’amplifier, affectant non croyants et croyants. Une version audio de cet article présenté lors de la crise étudiante du printemps 2012 – est accessible sous Matériel pour l’étude de la Bible.

La Bible peut-elle nous guider dans les pires moments ?

La Bible a-t-elle quelque chose de concret à nous dire quand tout va vraiment très mal ? « Quand il n’y a pas de révélation, le peuple ne connaît aucune retenue, mais s’il respecte la loi, il est heureux » (Pr 29:18, Segond 21).

Par « le peuple » il faut entendre ici toutes les couches de la société et toutes ses classes de participants : politiciens, policiers, leaders de tout ordre, citoyens. Je dirais que les mêmes principes s’appliquent tout autant aux difficultés vécues parfois au sein d’une communauté de foi : conseil d’Église, pasteurs, chrétiens adoptant une position ou une autre dans un conflit d’Église. De fait, chacun peut extrapoler le propos de cet article à n’importe quelle situation où tout va mal.

Sans révélation de Dieu de la part des prophètes, je ne saurais rien à propos de qui est Dieu, du salut qu’il m’offre, ni du type de vie qu’il préconise.

Ce sont les textes de la Bible qui m’apprennent à adopter des attitudes plutôt que d’autres et à régler mes comportements d’une certaine manière et non d’une autre, si mon souci premier est de plaire à Dieu d’une part et d’être béni de lui d’autre part.

Le présent article propose sept attitudes habilitantes pour vivre dans le monde en citoyens capables : (I) comprendre, (II) vouloir, (III) discerner, (IV) choisir le bien et (V) révérer Dieu, puis (VI) s’attacher à Christ et à sa Parole, (VII) afin d’apprendre à connaître Christ. Ceux-ci sont intégrés aux quatre points d’ancrage d’une attitude habilitante pour vivre dans le monde en citoyens capables : (A) choisir le bien; (B) aimer le Seigneur; (C) s’imprégner de la Parole; (D) découvrir Christ tout au long de notre vie – projet par excellence de ce que de nos jours l’on nomme parfois « formation continue ».

Ce qui est visé ici par les expressions « attitude habilitante » et « citoyen capable » est inspiré du terme d’origine anglaise « empowerment ». Nul ne peut rejeter sur quelqu’un d’autre ou sur les circonstances la responsabilité de ses actes, de ses paroles, de ses choix, de ses décisions.

Point d’ancrage A : choisir le bien

Attitudes I à IV : comprendre, vouloir, discerner, choisir le bien (Pr 1:1-6, 7).

Le concept de la sagesse telle que révélée dans le livre des Proverbes est très riche de sens. S’arrêter aux termes qui l’expriment nous aidera à mieux cerner de quoi il s’agit (Kidner, p. 36-37, Seg 21, NEG) : instruction (1:2a); intelligence (1:2b); bon sens (1:3a); discernement (1:4); connaissance (1:5).

Instruction (1:2a), terme parfois traduit par « entraînement » semble indiquer que pour acquérir la sagesse il faut y œuvrer systématiquement, comme nous le faisons lorsque nous nous donnons une formation dans un domaine précis.

Intelligence (1:2b), ce que Salomon demande à Dieu dans sa prière (1 R 3:10) (devenue célèbre) pour obtenir la sagesse – et qui, en passant, plut au Seigneur. Nous lisons en 1 R 3:9 : « Accorde donc à ton serviteur un cœur intelligent pour juger ton peuple, pour discerner le bien du mal ! » (NEG). En termes un peu plus clairs encore : « Accorde donc à ton serviteur un cœur apte à écouter pour juger ton peuple, pour distinguer le bien du mal !» (Segond 21).

Pour Discerner (1:4) avec bon sens (1:3a) et selon la connaissance (1:5), nous avons tous besoin d’appuis, de fondements, de bases pour nos convictions. Le livre des Proverbes se présente lui-même comme base pratique pour distinguer ce qu’il convient de faire ou de dire quand tout n’est pas simple (1:1-6). « La clé de la sagesse, c’est de révérer l’Éternel » (1:7, BDS), dit aussi ce texte.

Les Proverbes sont ponctués d’invitations à choisir la sagesse (1:20ss; 8:1ss), contrastées aux invitations de choisir la folie (voir Pr 9:13-18, après 9:1-12).

La mise en œuvre de cette sagesse a pour fondement une attitude intérieure tournée vers celui de qui nous avons obtenu la vie. C’est ce que nous dit, nous l’avons vu, Pr 1:7 en BDS : « La clé de la sagesse, c’est de révérer l’Éternel ».

Point d’ancrage B : craindre, respecter, révérer, aimer le Seigneur

Attitude habilitante V L pour vivre dans le monde en citoyens capables, révérer Dieu (Job 28:28; Pr 9:10; Pr 1:7).

« La crainte du Seigneur [révérer le Seigneur], voilà en quoi consiste la sagesse. S’éloigner du mal, voilà en quoi consiste l’intelligence » (Job 28:28).

« Le commencement de la sagesse, c’est la crainte de l’Éternel. La connaissance du Dieu saint, voilà en quoi consiste l’intelligence » (Pr 9:10).

« La connaissance commence par la crainte de l’Éternel. Il faut être fou pour mépriser la sagesse et l’instruction (Pr 1:7, Segond 21).

« To have knowledge, you must first have reverence for the Lord. Stupid people have no respect for wisdom and refuse to learn » (Pr 1:7, GNT). Il est tout à fait possible de refuser d’apprendre ce que Dieu veut que l’on sache !

Observons ici que…

Le terme «commencement» selon D. Kidner (Proverbs, 1964, p. 59), se réfère aussi au principe fondateur de la sagesse, sa «clé» : craindre l’Éternel. Cette forme de sagesse commence et se maintient par la révérence envers Dieu.

En conséquence de quoi l’on peut aussi traduire ces mêmes passages par :

« La clé de la sagesse, c’est de révérer l’Éternel, et la science des saints, c’est le discernement » (Pr 9:10, Bible du Semeur).

« La clé de la sagesse, c’est de révérer l’Éternel, mais les insensés dédaignent la sagesse et l’éducation » (Pr 1:7, BDS).

Point d’ancrage C : s’imprégner de la Parole de Christ

Attitude habilitante VI : pour vivre dans le monde en citoyens capables,
s’attacher à Christ (Col 2:3, 8) et à sa Parole (Col 3:16-17).

La folie n’est toutefois pas sans attraits. Elle s’opposait alors à la sagesse pratique enracinée dans la connaissance de Dieu selon les Proverbes. Choisissons la sagesse de Dieu, nous qui vivons après que Jésus soit mort et ressuscité. En Lui sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la connaissance (Col 2:3).

« Faites attention… » (Seg 21). « Veillez à ce que personne ne vous prenne au piège de la recherche d’une ‘sagesse’ qui n’est que tromperie et illusion, qui se fonde sur les traditions tout humaines, sur les principes élémentaires qui régissent la vie dans ce monde, mais non sur Christ » (Col 2:8, BDS).

« Que la parole du Christ réside au milieu de vous dans toute sa richesse : qu’elle vous inspire une pleine sagesse, pour vous instruire et vous avertir les uns les autres ou pour chanter à Dieu de tout votre cœur des psaumes, des hymnes et des cantiques inspirés par l’Esprit afin d’exprimer votre reconnaissance à Dieu. Dans tout ce que vous pouvez dire ou faire, agissez au nom du Seigneur Jésus, en remerciant Dieu le Père par lui »
(Col 3:16-17, BDS).

Point d’ancrage D : découvrir Christ tout au long de notre vie

Attitude VII : apprendre à connaître Christ (2 Pi 1:5-11 et 1 Pi 1:22-2:10).

Que l’on soit sous l’Ancienne ou sous la nouvelle alliance, le principe de formation continue demeure toujours présent. Les Proverbes nous l’enseignent, comme aussi les textes du NT, par exemple, 2 Pi 1:5-11 (BDS) :

« […] Faites tous vos efforts pour ajouter à votre foi la force de caractère, à la force de caractère la connaissance, à la connaissance la maîtrise de soi, à la maîtrise de soi l’endurance dans l’épreuve, à l’endurance l’attachement à Dieu, à cet attachement l’affection fraternelle, et à l’affection fraternelle l’amour » (2 Pi 1:5-7, BDS).

« Car si vous possédez ces qualités, et si elles grandissent sans cesse en vous, elles vous rendront actifs et vous permettront de connaître toujours mieux notre Seigneur Jésus-Christ » (2 Pi 1:8, BDS), ce qui se traduit aussi par, «En effet, si ces qualités sont en vous et se développent, elles ne vous laissent pas inactifs ni stériles pour la connaissance de N.S.J.C.» (2 Pi 1:8, Seg 21).

Par ailleurs, le reste de 2 Pi 1 nous rappelle que ce ne sont pas par des histoire habilement inventées que Christ a été révélé : nous pouvons nous appuyer fermement sur les paroles de Pierre, des apôtres et des prophètes.

Étant nés de nouveau en vertu de la parole vivante et permanente de Dieu, nous sommes invités à la désirer, comme pour un nouveau né, le lait, nous dit 1 Pi 1:22-2:3. Cette parole qui peut et veut habiter en nous est celle des Écritures tout entière.

En somme, il convient de faire des sept attitudes habilitantes l’objet d’une formation continue. En effet, comme pour n’importe quelle autre formation que nous désirons acquérir, rien ne se produira sans investissement soutenu de notre part – dans et par l’Esprit de liberté du Seigneur (2 Co 3:17). Sans cet Esprit de Christ en nous, nous ne pouvons rien comprendre (2 Co 3:16), nous ne pouvons rien faire (Jean 15:5).

Les Ps 1, 19 et 119 abondent dans le même sens que 1 Pi 2:2. Ils nous invitent à nous tourner vers les Écritures, à la fois comme source de désir et comme appui sur lequel fonder nos choix et nos actions quand rien n’est évident. C’est pourquoi je les propose comme base de réflexion et de méditation, avant même de lire aucune autre partie des Écritures dans un objectif d’habilitation.

Quant aux Proverbes, ils abondent en conseils pratiques à s’approprier ou à réinsérer à nos vies, de dilemmes auxquels réfléchir nous rappelant que tout n’est pas simple. Par ex. : l’insensé n’écoute pas si on lui parle mais si on ne lui parle pas il se croit supérieur. Alors donc lui parle-t-on ou garde-t-on silence ? Tout dépend… (Voir BDS version études, Proverbes 26:4-5 et note afférente; voir également la manière dont Paul répond aux Corinthiens selon leur propre folie en 2 Cor 10-13).

Les proverbes servaient à former les conseillers des rois. Ils peuvent nous guider. Vivons dans le monde en citoyens capables, peu importe l’état en lequel il se présente à nous. Formons-nous pour maîtriser ces sept attitudes habilitantes : (I) comprendre, (II) vouloir, (III) discerner, (IV) choisir le bien (V) et révérer Dieu, puis (VI) s’attacher à Christ et à sa Parole, (VII) en apprenant à connaître Christ. Voilà un projet de formation continue, avec l’Esprit comme accompagnant privé.

Questions pour réfléchir individuellement ou discuter en groupes

La Bible a-t-elle quelque chose de concret à nous dire quand tout va vraiment très mal ? Proverbes 29:18; Psaumes 1, 19, 119.

Ne répondrait-elle pas à des questions comme :
« sur quelle base fonder nos choix et nos actions ? » Proverbes 1:1-7; 9:1-18.

Ne constituerait-elle pas une source de formation pour vivre dans le monde en citoyens capables ? Col. 2:2-3; 2:8; 3:16-17; 2 Pi 1:5-11; 1 Pi 1:22-2:10.

Tiré de l’essai Comment donc comprendre la Bible aujourd’hui ? (annexe F).

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Auteur : Daniel Garneau, B Th, B Com, MA.
Édité : 16 juillet 2016; 15 mai 2017; 13 juillet 2018.